Au moment du départ
Sur
le papier c'est simple : mon vélo, Maréva, pas d'itinéraire, pas de
date de retour et pas d'argent. J'ai encore du mal à mettre des mots,
mais il y a une forme de résistance peut être, mais surtout une féroce
envie d'humain.
Qu'est-ce que tu veux faire quand tu seras grand ? On m'a tant et tant posé cette question. Aujourd'hui adulte je me demande s'il y a dans ma vie une partie de mes rêves d'enfant. Je ne crois pas avoir un jour répondu que je travaillerai, que je gagnerai beaucoup d'argent et que je serai estimé (ou pas) pour ma réussite et ma performance.
Alors oui aujourd'hui j'ai cette envie en moi de me recentrer, de me remettre en cause, de me remettre aussi un peu en danger. J'ai cette impression aujourd'hui de subir un peu ma vie et d'en être en permanence détourné de l'essentiel. Je me vois un peu comme un hamster qui court et court dans sa roue qui ne va nul part. Pour aller quelque part, il me faut aujourd'hui sortir de cette roue et tracer un autre chemin.
Dans ma tête, en tout cas pour ce qui est conscient, aujourd'hui je ne fuis rien. Et je ne dénigre pas ma situation ni ne juge tous ceux que j'y côtoie quotidiennement. Je suis un privilégié, il n'y a pas débat. Je ne retrouverai peut être plus jamais une telle situation sociale : un bon travail intéressant et dans lequel on me laisse pas mal de liberté, un très bon salaire, un 4/5ième, des collègues qui sont, pour la plupart, des amis... J'ai réuni presque tous les critères de réussite du jeune adulte qui rentrait il y a quelques années en classe préparatoire éco après son bac.
Le vélo s'est imposé assez naturellement. Ce n'est pas un but en soi, rouler pour rouler, ça ne l'a jamais été. Mais j'aime le déplacement à vélo, j'aime son rythme, j'aime la possibilité de petites routes et de petits chemins cachés. J'aime surtout qu'il laisse tant de place à la rencontre !
Maréva ? Pareil, tout a été assez naturel. Hop deux mots sur une vague idée de ce que j'ai dans la tête et la voilà sur mon porte bagage, comme une évidence. Mais comment en est-on arrivé là, tous les deux aux trajectoires pourtant si différentes. Nous ne nous sommes jamais vraiment influencé au sujet du vélo. Alors comment cette évidence de tout quitter et de partir ensemble a-t-elle pu s'imposer si naturellement et avec tant de force ? Les réponses viendront peut être, au fil des tours de roue...
Sans itinéraire, sans date de retour et sans argent
Le triptyque est assez simple. L'objectif est de se laisser la possibilité de voyager à l'envie, de se poser parfois, de ne pas calculer.Depuis que j'en parle autour de moi il y a un peu de tout.
Je vois sans y prêter attention le regard de ceux qui jugent et les sourires narquois.
Je mesure l'incompréhension, l'incompréhensible, et j'entends avec tendresse et humilité les interrogations et les doutes.
Je suis sincèrement touché par l'inquiétude, et je suis galvanisé par l'enthousiasme et les encouragements.
On me parle de fuite ou de rupture, mais le mot qui vient à moi c'est une émancipation.
Il y a plusieurs sens à un tel voyage, et on peut y voir une certains volonté de rupture : partir, fuir ou quitter. On me parle aussi parfois de liberté.
Ce n'est pas tout à fait ce que je ressens.
Émancipation
Oui voici le mot qui me vient le plus spontanément à l'esprit lorsque je réfléchis à ce projet. Une forme d'émancipation. S'émanciper de ce rythme imposé, effréné. Se soustraire aux jugements basés sur des critères de réussite et de performance. S'affranchir de l'argent qui rend fou et absurde, et qui change en profondeur notre rapport aux choses, notre rapport aux gens.Est-ce que je recherche quelque chose ? Oui certainement. Je cherche à éprouver mes idéaux naïfs : la beauté du monde et la bonté des Hommes. Je les aperçois parfois dans mon quotidien mais je les sens comprimés, bridés. Alors peut être qu'en s'émancipant du système, je les retrouverai libérés ?
Avec vous
Oui je m'émancipe d'une certaine forme de vie sociale. Par contre il n'est pas question de vous quitter vous que j'aime et qui comptez tant dans ma vie. Alors c'est la raison d'être de ce blog, garder le lien avec vous, partager l'aventure et vous y impliquer.Je ne suis pas parti et je sais déjà que c'est le manque de vous qui me fera revenir...
2 commentaires
Merci pour ce texte si inspirant ... il nous propulse dans notre propre voyage !
RépondreSupprimerNous adorons le moment du départ. Dès les premiers tours de pédale, la petite peur est remplacée par la griserie, la hâte de savoir ce qui nous attend. C'est ce qui est magique avec le vélo : on tourne la clé dans la serrure et instantanément on est dans le voyage. Enfin... vous, vous n'avez plus de serrure et pas de date de retour ! c'est encore une autre dimension...
On vous admire et on vous souhaite bonne route,
...et au hasard d'une prochaine rencontre !
signé : les premiers "Warmshowers" de Maréva...
Oh merci pour ce si gentil message. Je vois que Maréva a eu une première rencontre inspirante et enrichissante.
SupprimerLa prochaine rencontre pourrait ne pas être un hasard. Il suffit de tourner le clé et de venir sur la route 😊